- jeu. sept. 24, 2009 11:18 pm
#149081
Bonjour à toutes et à tous,
Je me présente : Matthieu, je viens d'avoir 23 ans, je suis étudiant et vit seul sur Paris.
J'aimerais commencer par le début afin que vous compreniez mieux ma souffrance psychologique, avant d'arriver à mon problème de cyphose (jfais ma thérapie en même temps lol).
Vers mes 11-12 ans, avec le début de la puberté, j'ai eu une gynécomastie qui est apparue (c'est un développement excessif des seins chez l'homme : pour plus d'infos ), qui était assez importante.
J'ai subi pas mal de moqueries (je ne suis pas rancunier, j'ai compris avec le recul qu'à cet âge on ne mesure pas nos paroles, on n'arrive pas encore à se mettre à la place de l'autre).
Avec le temps, j'ai alors mis en place plus ou moins consciemment une "stratégie" pour dissimuler le plus possible ma gène : j'évitais de porter des tshirt ou tout vêtement moulant, je ne mettais jamais les pieds à la piscine si ce n'était pas obligatoire etc..
Ensuite, et je mesure à présent l'étendue des conséquences, je me tenais constamment vouté et j'enroulais les épaules en avant, afin comme toujours de masquer ma gynécomastie.
Cette attitude cyphotique a en outre été favorisée par ma croissance fulgurante, période courte pendant laquelle je prenais plus d'une dizaine de centimètres par an, et j'avais par conséquent du mal à m'habituer à ce grand corps déguindé.
Bref, j'avais peu d'estime pour ma personne : je me considérais comme quelqu'un de marginal, une personne qui ne méritait pas d'avoir une adolescence normale, et surtout qui ne pouvait pas : ma différence paralysait en effet totalement toute entreprise amoureuse, je me disais souvent à moi même "mais tas vu comment tu es, ce n'est pas pour toi tout ça...", et mes loisirs se résumaient dans un premier temps à la lecture puis à rester derrière mon ordinateur quand le haut débit s'est démocratisé.
J'avais quelques amis qui me ressemblaient, un peu geek et renfermés sur les bords, mais jamais je n'aurais osé me confier à l'un d'entre eux, ils n'auraient pas compris, j'employais plutôt mes forces à cacher mon "handicap".
Côté médecins, ces derniers me disaient que la gynécomastie allait se résorber d'elle même (dans la grande majorité des cas cela se passe de cette manière), que c'était une manifestation fréquente de la puberté, mais ils ne mesuraient pas mon malaise psychologique, de même que mes parents; toutefois je ne leur facilitais pas la tâche car j'étais très très renfermé, je restais seul avec mon mal.
Les années passant, la résignation s'était installée et je tentais d'oublier ma gynécomastie en me réfugiant dans les jeux vidéo en réseau (cs pour les connaisseurs ;) ), ces derniers me subjuguaient totalement, mais au moins j'avais l'impression d'être "quelqu'un" dans ce monde virtuel, car j'étais plutôt doué et je communiquais avec des ados de mon âge qui me respectaient pour ce que j'étais.
Cette période intensive de jeux vidéo aujourd'hui révolue a duré cinq années, et vers la fin de celle-ci à 19 ans j'ai eu enfin un déclic : en parcourant un forum je suis tombé sur le témoignage d'une personne dont le parcours me ressemblait, et qui s'était fait opérer, avec succès.
Je pleurais en lisant son récit : il avait ressenti au quotidien exactement les mêmes choses que moi, je n'étais plus seul.
Comme sorti d'une longue - trop longue - hibernation, j'ai imprimé son histoire et je suis allé la tendre à mes parents, tremblant d'émotion, sans une parole.
J'étais enfin arrivé à leur faire comprendre ce que je ressentais : je n'y étais jamais arrivé jusque-là car je vivais ma situation comme une sorte de honte, quelque chose de tabou, et par ailleurs j'avais entretenu jusqu'à mes 18 ans l'espoir que la gynécomastie parte avec la puberté comme on me l'avait affirmé.
Fin de l'histoire : août 2005, un an après mon bac, je me faisais opérer de ma gynécomastie persistante.
Une poitrine parfaitement plate ne pouvait être obtenue sans risque de nécroses selon la chirurgienne, alors je garde aujourd'hui les mamelons un peu enflés par rapport à la normale, mais cela n'a plus rien à voir avec ma situation antérieure et surtout, surtout, je ne complexe plus. Sur ce point là.
En effet, tandis que je suivais tous les jours l'évolution de la cicatrisation et de la disparition des hématomes, j'ai pris conscience avec un certain effroi de l'état de mon dos en l'apercevant, par un jeu de reflets, de profil.
Je n'avais ainsi pas du tout mesuré l'ampleur du problème durant toutes ces années où j'étais comme amorphe, comme un zombie qui se contente de subir, anesthésié par les jeux vidéo.
On m'avait bien dit de temps en temps de me redresser à table, un ami une fois m'avait fait remarqué que j'avais un cou de tortue, mais je prenais ça à la légère, ma gynécomastie m'obnubilait davantage à l'époque.
Mon médecin traitant une fois avait constaté une cyphose et une lordose exagérées, et m'avait conseillé sans être alarmiste de faire du crawl sur le dos (je n'osais pas lui dire que la piscine et moi ça faisait plus que deux...).
Un peu plus tard en seconde on m'avait prescrit des séances de kiné car je me plaignais de douleurs dans le haut du dos, mais rien de plus, pas de corset envisagé, de toute façon il devait être trop tard car je pense que ma croissance était déjà terminée à cette époque.
Alors à partir de 2006, malgré la quasi disparition de ma gynécomastie qui aurait du me remonter le moral, j'avais l'impression que le sort me jouait un tour d'une ironie malsaine ; comme si un complexe était remplacé par un autre.. =] ou plutôt la disparition d'un complexe en révélait un autre.
Ainsi, souvent, je me tenais pendant de longues minutes de profil devant la glace, je m'observais sous toutes les coutures et je ne pouvais au final que constater avec résignation cette sorte de bosse disgracieuse, qui était horriblement accentuée si je tentais en vain de toucher mes pieds (je ne m'arrête qu'au milieu des tibias), et cette cambrure importante.
J'ai compris à la longue que la cyphose et la lordose étaient moins accentuées si je contractais les abdominaux et tentais de mettre le plus possible ma tête dans l'axe de la colonne (si ça peut aider certains il faut s'imaginer et se répéter mentalement "un petit cou, une longue nuque"; rentrer le menton quoi).
Ensuite il y a deux ans je me suis mis à la musculation :
au début je raisonnais innocemment comme quelqu'un qui a un dos droit et qui débute ce sport; je faisais alors un peu n'importe quoi, et je n'avais pas les moyens d'aller me faire conseiller en salle de sport.
Puis au fil de mes lectures sur le net et de ma prise de conscience de mon dos déformé (parfois de manière irrationnelle pour atténuer mon mal-être je me persuade mentalement que mon dos est bien droit.. puis je désenchante en vérifiant dans la glace..), j'ai adopté des séances plus adaptées à ma cyphose : je privilégie les exercices ouvrant la cage thoracique et élargissant le dos (je me dis autant être vouté et costaud plutôt que vouté et rachitique.. après c'est plus l'ego qui parle là), et j'essaie de m'étirer quotidiennement.
Cela a payé au moins dans un sens : j'ai moins de douleurs dans le haut du dos, par contre, le fait de rester debout trop longtemps (par exemple attendre pour un concert) m'a toujours fait très mal dans le bas du dos, malgré une contraction des abdominaux (exercices que je privilégie également).
Depuis que je fais du sport aussi je sens que j'ai un meilleur maintien, j'éprouve moins de difficultés pour me tenir le plus droit possible.
Mais quand la fatigue se fait ressentir j'ai tendance à m'avachir, alors parfois je me surprends en position voutée et je me redresse mais bon, c'est dur de lutter contre nos os qui n'ont pas poussé correctement.
Alors j'en arrive enfin à ce qui m'amène sur votre forum (au fait une formidable idée qui a dû et doit aider psychologiquement beaucoup de monde) :
je suis quasiment certain que je ne peux ou qu'on me déconseillera de me faire opérer : malgré mon blocage à la limite (ptet même qu'elle a été franchie =] )
de la pathologie mentale, je suis quand même relativement lucide et j'ai conscience que ma cyphose n'est pas un cas désespéré, que je suis un pti joueur à côté de quasimodo :D
Mais paradoxalement j'ai besoin d'entendre de la voix même d'un spécialiste qu'une opération n'est pas nécessaire dans mon cas, que ça serait prendre de gros risques pour rien, bien qu'au fond de moi j'ai l'espoir - inespéré - de me réveiller un jour avec un corps normal.
Car même si j'ai passé le cap de la prise de conscience de la forme de mon dos, je crains toujours le regard des gens et j'éprouve toujours un sentiment de culpabilité : si seulement je m'étais rendu compte du problème plus jeune, peut-être que j'aurais pu redresser la chose avec de la musculation, comme je l'ai lu parfois.. mais ma gynécomastie me masquait la réalité.
Crainte du regard des gens : ça se manifeste par exemple de la manière suivante : ça peut paraître bête mais j'éprouve toujours une gène quand je passe de profil devant des gens (qui sont attablés à une terrasse de café ou qui attendent dans leur voiture à un passage protégé, etc..), je ressens un peu comme de la honte, je m'imagine (à tort sûrement) ce que pense les gens : "tas vu la dégaine qu'il a lui avec le cou en avant", "il a un dos bizarre"..
Souvent, je tente de relativiser en pensant aux personnes qui vivent des choses mille fois pires : grands brûlés, défigurés, tétraplégiques..
Mais on est tous au fond de nous un peu égoiste, on aimerait tous être le plus beau.. bien que l'un des seuls avantages que j'ai pu retirer de toutes ces années est ma grande sensibilité et ma faculté à comprendre les troubles de l'autre.
Niveau sentimental ben ya pas de sentiments en fait pour le moment ^^;
je suis loin d'avoir confiance en moi encore, ce sentiment d'infériorité par rapport aux autres que je connaissais avec la gynécomastie ne m'a jamais vraiment quitté, je me dis qu'avec mon allure je ne mérite pas d'être avec une fille (ça peut vous paraitre difficilement compréhensible si vous avez complètement accepté votre dos, mais pour l'instant ce sentiment quasi constant de marginalité est plus fort que moi, c'est ce que je ressens et ce que j'ai toujours ressenti).
Je sais que dans la vie il n'y a pas que le physique, qu'on peut compenser avec de l'humour, sa personnalité etc.., mais à chaque fois j'en reviens à ce constat (que vous trouverez sûrement emprunt de paranoia et d'absurdité mais bon) : je me dis que même si une personne moche ne se prend pas la tête, s'accepte comme elle est, n'a pas de complexe, au moins la "mocheté" s'est banal (lol je rigole tout seul en écrivant mes conneries..), ya toujours moyen par des artifices de s'embellir; alors qu'un dos bizarre un peu en forme de S ben s'est difficilement dissimulable, le creux du dos se cache un peu avec des vêtements amples mais on n'a pas objectivement une silhouette élégante avec des vêtements plus près du corps, un costume par exemple.
Vous me répondrez que ce ne sont que des considérations purement esthétiques :
mais je n'ai que 23 ans, l'écoulement du temps ne m'a pas encore donné votre maturité, votre sagesse face à ces malformations physiques.
Je n'arrive pas à me résigner à cette situation, à accepter définitivement mon physique en le prenant avec le sourire.
Autour de moi, surtout ici à Paris, je vois des jeunes de mon âge qui n'ont jamais connu de tels problèmes (mince j'ai les larmes aux yeux =] ), qui sont insouciants, confiants, ambitieux, heureux de vivre, qui ont des projets pour l'avenir.
Moi j'ai l'impression de n'avoir jamais véritablement commencé ma vie, je n'ai pas eu d'adolescence classique, et mon renfermement face à ces complexes m'empêche de me projeter dans l'avenir.
Quand je tente d''imaginer mon futur je ne vois que du néant, je n'arrive pas à me convaincre que je pourrais avoir une vie normale, avec une femme qui m'aime, des enfants, un boulot attrayant, et surtout éprouver de l'insouciance.
Parfois je suis obsédé par ce foutu dos, j'ai très souvent le réflexe d'observer les gens dans la rue et de me dire "p. censuré s'ils savaient la chance qu'ils ont d'avoir un dos bien droit".
Quand j'aperçois quelqu'un que je pense vouté, j'ai un pti espoir de rencontrer quelqu'un comme moi, puis je constate qu'il a une simple attitude cyphotique, mais qu'il a le dos droit au moins lui. Pareil pour les personnes âgées, qui très souvent sont courbées mais qui n'ont pas de vouture pathologique ou à peine.
A la plage, à la télé (dédicace à koh lanta) etc.. quand je vois des gens torse nu avec un dos normal j'ai toujours cette petite boule au ventre et ce réflexe de me dire j'aurais pu être comme eux; j'aurais du être comme eux.
Je n'éprouve aucune jalousie malsaine mais je me dis "pourquoi moi quoi".
Je n'ai vu que deux personnes dans la rue qui avaient clairement une hypercyphose et lordose et, de la même façon que lorsque je me regarde de profil dans la glace, c'est comme si je prenais un coup de poignard, car je vois la réalité en face, je prends conscience de l'image que je projette aux gens.
D'autres fois je suis comme je devrais être, c'est-à-dire que j'arrête de faire une fixation sur ce dos, je suis jovial, je relativise mon manque de confiance en moi (jme suis pas mal renfermé depuis la gynécomastie pour me protéger en fait), je me dis que ça va s'arranger, que je trouverai quelqu'un qui m'aimera pour ce que je suis, que j'arriverai à prendre la parole en public sans être mal à l'aise... Plus quand je suis entouré d'amis en fait, seul c'est vrai que mes angoisses reviennent.
Voilà, contrairement à la gynécomastie pas de happy end ici :p enfin qui sait.
J'ai conscience qu'il faut que je fasse un gros travail sur moi même, je pense avec l'aide d'un psy, et que je consulte un spécialiste du dos.
Je commence depuis peu à avoir le courage de parler de ce complexe, j'en ai parlé à deux personnes déjà, mais avec mes parents c'est un peu plus dur niveau communication, surtout avec mon père ultra autoritaire qui a toujours eu du mal à me comprendre.
Au final aujourd'hui je suis quand même beaucoup moins renfermé qu'à l'époque de ma gynécomastie, je suis volontaire pour m'en sortir, et sur le plan amical notamment je n'ai plus de problème de communication, c'est pour ça qu'un ami a été assez surpris quand je lui ai parlé de mon mal-être par rapport au dos, j'avais toujours tout gardé pour moi jusque-là, j'ai sous-estimé les vertus du partage.
Alors mes questions sont les suivantes :
1) Pouvez-vous m'adresser le nom d'un chirurgien de renom sur Paris ou dans toute la France s'il le faut (un chirurgien orthopédique c'est ça?)
Comme je l'ai dit plus haut, je pense au vu de ce que j'ai lu qu'une opération ne me sera pas recommandée car je ne pense pas être un cas grave, mais au moins j'aimerais vivement l'avis d'un spécialiste car je n'ai jamais été suivi pour le dos. Et si j'ai bien compris la cyphose évolue souvent avec l'âge..
2) J'aimerais bien rencontrer une personne qui souffre d'une cyphose aussi, si elle a à peu près le même âge que moi c'est mieux pour les points en communs mais bon c'est pas grave sinon (je vis sur Paris mais bon je peux bouger un minimum).
Je précise le terme de "cyphose" car je sais qu'à la base c'est un forum de scoliose; d'ailleurs les scolioseux vous avez de la "chance" parce que apparemment votre affection est mieux traitée que la nôtre, enfin d'après ce que j'ai lu il y a plus de recul au niveau du suivi chirurgical... et m. censuré j'ai tiré au sort la mauvaise malformation ^^ (enfin pas sûr je crois me souvenir que mon médecin m'avait dit que j'avais une légère scoliose aussi, mais bon quand on aime on ne compte pas comme on dit =] )
3) Enfin une question subsidiaire, je vais chercher de mon côté mais si quelqu'un connait un psychiatre parisien qui est au fait de ce genre de problème de dos je veux bien prendre (je consultais une psychologue pour des troubles de panique suite à un décès et je lui avais parlé de mon dos mais bon elle n'était pas top)
Enfin, désolé pour la longueur du récit (j'ai pété le record du forum non?) mais ça me fait du bien de coucher mes problèmes par écrit, et pour que vous me compreniez un peu mieux, et puis peut-être qu'une personne se reconnaitra un peu en me lisant (si elle a le courage de me lire en entier lol).
Je me présente : Matthieu, je viens d'avoir 23 ans, je suis étudiant et vit seul sur Paris.
J'aimerais commencer par le début afin que vous compreniez mieux ma souffrance psychologique, avant d'arriver à mon problème de cyphose (jfais ma thérapie en même temps lol).
Vers mes 11-12 ans, avec le début de la puberté, j'ai eu une gynécomastie qui est apparue (c'est un développement excessif des seins chez l'homme : pour plus d'infos ), qui était assez importante.
J'ai subi pas mal de moqueries (je ne suis pas rancunier, j'ai compris avec le recul qu'à cet âge on ne mesure pas nos paroles, on n'arrive pas encore à se mettre à la place de l'autre).
Avec le temps, j'ai alors mis en place plus ou moins consciemment une "stratégie" pour dissimuler le plus possible ma gène : j'évitais de porter des tshirt ou tout vêtement moulant, je ne mettais jamais les pieds à la piscine si ce n'était pas obligatoire etc..
Ensuite, et je mesure à présent l'étendue des conséquences, je me tenais constamment vouté et j'enroulais les épaules en avant, afin comme toujours de masquer ma gynécomastie.
Cette attitude cyphotique a en outre été favorisée par ma croissance fulgurante, période courte pendant laquelle je prenais plus d'une dizaine de centimètres par an, et j'avais par conséquent du mal à m'habituer à ce grand corps déguindé.
Bref, j'avais peu d'estime pour ma personne : je me considérais comme quelqu'un de marginal, une personne qui ne méritait pas d'avoir une adolescence normale, et surtout qui ne pouvait pas : ma différence paralysait en effet totalement toute entreprise amoureuse, je me disais souvent à moi même "mais tas vu comment tu es, ce n'est pas pour toi tout ça...", et mes loisirs se résumaient dans un premier temps à la lecture puis à rester derrière mon ordinateur quand le haut débit s'est démocratisé.
J'avais quelques amis qui me ressemblaient, un peu geek et renfermés sur les bords, mais jamais je n'aurais osé me confier à l'un d'entre eux, ils n'auraient pas compris, j'employais plutôt mes forces à cacher mon "handicap".
Côté médecins, ces derniers me disaient que la gynécomastie allait se résorber d'elle même (dans la grande majorité des cas cela se passe de cette manière), que c'était une manifestation fréquente de la puberté, mais ils ne mesuraient pas mon malaise psychologique, de même que mes parents; toutefois je ne leur facilitais pas la tâche car j'étais très très renfermé, je restais seul avec mon mal.
Les années passant, la résignation s'était installée et je tentais d'oublier ma gynécomastie en me réfugiant dans les jeux vidéo en réseau (cs pour les connaisseurs ;) ), ces derniers me subjuguaient totalement, mais au moins j'avais l'impression d'être "quelqu'un" dans ce monde virtuel, car j'étais plutôt doué et je communiquais avec des ados de mon âge qui me respectaient pour ce que j'étais.
Cette période intensive de jeux vidéo aujourd'hui révolue a duré cinq années, et vers la fin de celle-ci à 19 ans j'ai eu enfin un déclic : en parcourant un forum je suis tombé sur le témoignage d'une personne dont le parcours me ressemblait, et qui s'était fait opérer, avec succès.
Je pleurais en lisant son récit : il avait ressenti au quotidien exactement les mêmes choses que moi, je n'étais plus seul.
Comme sorti d'une longue - trop longue - hibernation, j'ai imprimé son histoire et je suis allé la tendre à mes parents, tremblant d'émotion, sans une parole.
J'étais enfin arrivé à leur faire comprendre ce que je ressentais : je n'y étais jamais arrivé jusque-là car je vivais ma situation comme une sorte de honte, quelque chose de tabou, et par ailleurs j'avais entretenu jusqu'à mes 18 ans l'espoir que la gynécomastie parte avec la puberté comme on me l'avait affirmé.
Fin de l'histoire : août 2005, un an après mon bac, je me faisais opérer de ma gynécomastie persistante.
Une poitrine parfaitement plate ne pouvait être obtenue sans risque de nécroses selon la chirurgienne, alors je garde aujourd'hui les mamelons un peu enflés par rapport à la normale, mais cela n'a plus rien à voir avec ma situation antérieure et surtout, surtout, je ne complexe plus. Sur ce point là.
En effet, tandis que je suivais tous les jours l'évolution de la cicatrisation et de la disparition des hématomes, j'ai pris conscience avec un certain effroi de l'état de mon dos en l'apercevant, par un jeu de reflets, de profil.
Je n'avais ainsi pas du tout mesuré l'ampleur du problème durant toutes ces années où j'étais comme amorphe, comme un zombie qui se contente de subir, anesthésié par les jeux vidéo.
On m'avait bien dit de temps en temps de me redresser à table, un ami une fois m'avait fait remarqué que j'avais un cou de tortue, mais je prenais ça à la légère, ma gynécomastie m'obnubilait davantage à l'époque.
Mon médecin traitant une fois avait constaté une cyphose et une lordose exagérées, et m'avait conseillé sans être alarmiste de faire du crawl sur le dos (je n'osais pas lui dire que la piscine et moi ça faisait plus que deux...).
Un peu plus tard en seconde on m'avait prescrit des séances de kiné car je me plaignais de douleurs dans le haut du dos, mais rien de plus, pas de corset envisagé, de toute façon il devait être trop tard car je pense que ma croissance était déjà terminée à cette époque.
Alors à partir de 2006, malgré la quasi disparition de ma gynécomastie qui aurait du me remonter le moral, j'avais l'impression que le sort me jouait un tour d'une ironie malsaine ; comme si un complexe était remplacé par un autre.. =] ou plutôt la disparition d'un complexe en révélait un autre.
Ainsi, souvent, je me tenais pendant de longues minutes de profil devant la glace, je m'observais sous toutes les coutures et je ne pouvais au final que constater avec résignation cette sorte de bosse disgracieuse, qui était horriblement accentuée si je tentais en vain de toucher mes pieds (je ne m'arrête qu'au milieu des tibias), et cette cambrure importante.
J'ai compris à la longue que la cyphose et la lordose étaient moins accentuées si je contractais les abdominaux et tentais de mettre le plus possible ma tête dans l'axe de la colonne (si ça peut aider certains il faut s'imaginer et se répéter mentalement "un petit cou, une longue nuque"; rentrer le menton quoi).
Ensuite il y a deux ans je me suis mis à la musculation :
au début je raisonnais innocemment comme quelqu'un qui a un dos droit et qui débute ce sport; je faisais alors un peu n'importe quoi, et je n'avais pas les moyens d'aller me faire conseiller en salle de sport.
Puis au fil de mes lectures sur le net et de ma prise de conscience de mon dos déformé (parfois de manière irrationnelle pour atténuer mon mal-être je me persuade mentalement que mon dos est bien droit.. puis je désenchante en vérifiant dans la glace..), j'ai adopté des séances plus adaptées à ma cyphose : je privilégie les exercices ouvrant la cage thoracique et élargissant le dos (je me dis autant être vouté et costaud plutôt que vouté et rachitique.. après c'est plus l'ego qui parle là), et j'essaie de m'étirer quotidiennement.
Cela a payé au moins dans un sens : j'ai moins de douleurs dans le haut du dos, par contre, le fait de rester debout trop longtemps (par exemple attendre pour un concert) m'a toujours fait très mal dans le bas du dos, malgré une contraction des abdominaux (exercices que je privilégie également).
Depuis que je fais du sport aussi je sens que j'ai un meilleur maintien, j'éprouve moins de difficultés pour me tenir le plus droit possible.
Mais quand la fatigue se fait ressentir j'ai tendance à m'avachir, alors parfois je me surprends en position voutée et je me redresse mais bon, c'est dur de lutter contre nos os qui n'ont pas poussé correctement.
Alors j'en arrive enfin à ce qui m'amène sur votre forum (au fait une formidable idée qui a dû et doit aider psychologiquement beaucoup de monde) :
je suis quasiment certain que je ne peux ou qu'on me déconseillera de me faire opérer : malgré mon blocage à la limite (ptet même qu'elle a été franchie =] )
de la pathologie mentale, je suis quand même relativement lucide et j'ai conscience que ma cyphose n'est pas un cas désespéré, que je suis un pti joueur à côté de quasimodo :D
Mais paradoxalement j'ai besoin d'entendre de la voix même d'un spécialiste qu'une opération n'est pas nécessaire dans mon cas, que ça serait prendre de gros risques pour rien, bien qu'au fond de moi j'ai l'espoir - inespéré - de me réveiller un jour avec un corps normal.
Car même si j'ai passé le cap de la prise de conscience de la forme de mon dos, je crains toujours le regard des gens et j'éprouve toujours un sentiment de culpabilité : si seulement je m'étais rendu compte du problème plus jeune, peut-être que j'aurais pu redresser la chose avec de la musculation, comme je l'ai lu parfois.. mais ma gynécomastie me masquait la réalité.
Crainte du regard des gens : ça se manifeste par exemple de la manière suivante : ça peut paraître bête mais j'éprouve toujours une gène quand je passe de profil devant des gens (qui sont attablés à une terrasse de café ou qui attendent dans leur voiture à un passage protégé, etc..), je ressens un peu comme de la honte, je m'imagine (à tort sûrement) ce que pense les gens : "tas vu la dégaine qu'il a lui avec le cou en avant", "il a un dos bizarre"..
Souvent, je tente de relativiser en pensant aux personnes qui vivent des choses mille fois pires : grands brûlés, défigurés, tétraplégiques..
Mais on est tous au fond de nous un peu égoiste, on aimerait tous être le plus beau.. bien que l'un des seuls avantages que j'ai pu retirer de toutes ces années est ma grande sensibilité et ma faculté à comprendre les troubles de l'autre.
Niveau sentimental ben ya pas de sentiments en fait pour le moment ^^;
je suis loin d'avoir confiance en moi encore, ce sentiment d'infériorité par rapport aux autres que je connaissais avec la gynécomastie ne m'a jamais vraiment quitté, je me dis qu'avec mon allure je ne mérite pas d'être avec une fille (ça peut vous paraitre difficilement compréhensible si vous avez complètement accepté votre dos, mais pour l'instant ce sentiment quasi constant de marginalité est plus fort que moi, c'est ce que je ressens et ce que j'ai toujours ressenti).
Je sais que dans la vie il n'y a pas que le physique, qu'on peut compenser avec de l'humour, sa personnalité etc.., mais à chaque fois j'en reviens à ce constat (que vous trouverez sûrement emprunt de paranoia et d'absurdité mais bon) : je me dis que même si une personne moche ne se prend pas la tête, s'accepte comme elle est, n'a pas de complexe, au moins la "mocheté" s'est banal (lol je rigole tout seul en écrivant mes conneries..), ya toujours moyen par des artifices de s'embellir; alors qu'un dos bizarre un peu en forme de S ben s'est difficilement dissimulable, le creux du dos se cache un peu avec des vêtements amples mais on n'a pas objectivement une silhouette élégante avec des vêtements plus près du corps, un costume par exemple.
Vous me répondrez que ce ne sont que des considérations purement esthétiques :
mais je n'ai que 23 ans, l'écoulement du temps ne m'a pas encore donné votre maturité, votre sagesse face à ces malformations physiques.
Je n'arrive pas à me résigner à cette situation, à accepter définitivement mon physique en le prenant avec le sourire.
Autour de moi, surtout ici à Paris, je vois des jeunes de mon âge qui n'ont jamais connu de tels problèmes (mince j'ai les larmes aux yeux =] ), qui sont insouciants, confiants, ambitieux, heureux de vivre, qui ont des projets pour l'avenir.
Moi j'ai l'impression de n'avoir jamais véritablement commencé ma vie, je n'ai pas eu d'adolescence classique, et mon renfermement face à ces complexes m'empêche de me projeter dans l'avenir.
Quand je tente d''imaginer mon futur je ne vois que du néant, je n'arrive pas à me convaincre que je pourrais avoir une vie normale, avec une femme qui m'aime, des enfants, un boulot attrayant, et surtout éprouver de l'insouciance.
Parfois je suis obsédé par ce foutu dos, j'ai très souvent le réflexe d'observer les gens dans la rue et de me dire "p. censuré s'ils savaient la chance qu'ils ont d'avoir un dos bien droit".
Quand j'aperçois quelqu'un que je pense vouté, j'ai un pti espoir de rencontrer quelqu'un comme moi, puis je constate qu'il a une simple attitude cyphotique, mais qu'il a le dos droit au moins lui. Pareil pour les personnes âgées, qui très souvent sont courbées mais qui n'ont pas de vouture pathologique ou à peine.
A la plage, à la télé (dédicace à koh lanta) etc.. quand je vois des gens torse nu avec un dos normal j'ai toujours cette petite boule au ventre et ce réflexe de me dire j'aurais pu être comme eux; j'aurais du être comme eux.
Je n'éprouve aucune jalousie malsaine mais je me dis "pourquoi moi quoi".
Je n'ai vu que deux personnes dans la rue qui avaient clairement une hypercyphose et lordose et, de la même façon que lorsque je me regarde de profil dans la glace, c'est comme si je prenais un coup de poignard, car je vois la réalité en face, je prends conscience de l'image que je projette aux gens.
D'autres fois je suis comme je devrais être, c'est-à-dire que j'arrête de faire une fixation sur ce dos, je suis jovial, je relativise mon manque de confiance en moi (jme suis pas mal renfermé depuis la gynécomastie pour me protéger en fait), je me dis que ça va s'arranger, que je trouverai quelqu'un qui m'aimera pour ce que je suis, que j'arriverai à prendre la parole en public sans être mal à l'aise... Plus quand je suis entouré d'amis en fait, seul c'est vrai que mes angoisses reviennent.
Voilà, contrairement à la gynécomastie pas de happy end ici :p enfin qui sait.
J'ai conscience qu'il faut que je fasse un gros travail sur moi même, je pense avec l'aide d'un psy, et que je consulte un spécialiste du dos.
Je commence depuis peu à avoir le courage de parler de ce complexe, j'en ai parlé à deux personnes déjà, mais avec mes parents c'est un peu plus dur niveau communication, surtout avec mon père ultra autoritaire qui a toujours eu du mal à me comprendre.
Au final aujourd'hui je suis quand même beaucoup moins renfermé qu'à l'époque de ma gynécomastie, je suis volontaire pour m'en sortir, et sur le plan amical notamment je n'ai plus de problème de communication, c'est pour ça qu'un ami a été assez surpris quand je lui ai parlé de mon mal-être par rapport au dos, j'avais toujours tout gardé pour moi jusque-là, j'ai sous-estimé les vertus du partage.
Alors mes questions sont les suivantes :
1) Pouvez-vous m'adresser le nom d'un chirurgien de renom sur Paris ou dans toute la France s'il le faut (un chirurgien orthopédique c'est ça?)
Comme je l'ai dit plus haut, je pense au vu de ce que j'ai lu qu'une opération ne me sera pas recommandée car je ne pense pas être un cas grave, mais au moins j'aimerais vivement l'avis d'un spécialiste car je n'ai jamais été suivi pour le dos. Et si j'ai bien compris la cyphose évolue souvent avec l'âge..
2) J'aimerais bien rencontrer une personne qui souffre d'une cyphose aussi, si elle a à peu près le même âge que moi c'est mieux pour les points en communs mais bon c'est pas grave sinon (je vis sur Paris mais bon je peux bouger un minimum).
Je précise le terme de "cyphose" car je sais qu'à la base c'est un forum de scoliose; d'ailleurs les scolioseux vous avez de la "chance" parce que apparemment votre affection est mieux traitée que la nôtre, enfin d'après ce que j'ai lu il y a plus de recul au niveau du suivi chirurgical... et m. censuré j'ai tiré au sort la mauvaise malformation ^^ (enfin pas sûr je crois me souvenir que mon médecin m'avait dit que j'avais une légère scoliose aussi, mais bon quand on aime on ne compte pas comme on dit =] )
3) Enfin une question subsidiaire, je vais chercher de mon côté mais si quelqu'un connait un psychiatre parisien qui est au fait de ce genre de problème de dos je veux bien prendre (je consultais une psychologue pour des troubles de panique suite à un décès et je lui avais parlé de mon dos mais bon elle n'était pas top)
Enfin, désolé pour la longueur du récit (j'ai pété le record du forum non?) mais ça me fait du bien de coucher mes problèmes par écrit, et pour que vous me compreniez un peu mieux, et puis peut-être qu'une personne se reconnaitra un peu en me lisant (si elle a le courage de me lire en entier lol).