Bonsoir à tous,
Il y a longtemps que je songe à ce message, mais j’attendais d’avoir assez d’énergie pour l’écrire, le temps devant l’ordi étant compté pour moi. Maintenant 5 mois depuis l’opération, le moment est venu pour un bilan.
Ma fille Clara a donné de mes nouvelles dans les jours qui ont suivi l’intervention et je l’en remercie vivement. Mais elle est toute jeune, notre Clarinette, et je sais que son père ne lui a pas tout dit pour ne pas l’effrayer sur le moment, alors que nous étions à 300kms d’elle.
L’opération s’est très bien déroulée, en dépit des 5 litres de sang perdus (un changement d’huile complet, comme dit le chir) et au dernier contrôle, mon dos était merveilleusement droit.
Mais je m’interroge souvent sur la description que l’on donne de la douleur sur ce site. Je m’étais bien préparée à tous les aspects de l’opération, sauf à celui-là. Je sais bien que le seuil de douleur est différent pour chaque personne, la prise en charge hospitalière de cette douleur de même que les interventions le sont également. Ce que je m’apprête à dire n’est qu’une expérience parmi d’autres, mais je pense qu’il faut dire ce genre de choses aussi. Si je vais sur les messages post-op, je lis : « les premiers jours sont un peu difficiles »; « les premières nuits ne sont pas vraiment drôles ». Je m’interroge sur ces atténuations : « un peu difficile », « pas vraiment drôle ». C’est peut-être une question culturelle, peut-être qu’en France on ne doit pas s’appesantir sur ce genre de chose, peut-être encore est-ce de l’autocensure de la part de gens qui ne veulent pas effrayer. Bref mon vécu est autre et mon envie est de le décrire un peu plus crûment, car ça peut arriver, il faut s'y préparer : dans mon cas, la douleur a été atroce et la prise en charge de la douleur, nulle. À quoi ressemble cette douleur? Pour moi, l’impression d’être couchée sur une plaque de fer rouge, jour et nuit. Le premier lever le lendemain? Une pure horreur. Quant à cette fameuse prise en charge de la douleur à l’hôpital, là où j’ai été opérée, c’est un beau discours et rien d’autre. Oui, les produits performants existent. Encore faut-il donner les dosages prescrits par le médecin et les donner au bon moment, et ça n’a pas toujours été le cas. Avis aux futurs opérés québécois : on choisit son chirurgien (et je n’ai que de belles choses à dire de celui qui m’a opérée), mais pas l’hôpital. Et au Québec, presque tous les chir ayant l’expertise nécessaire travaillent à l’hôpital dont je parle, alors il vaut mieux être prévenu. Il ne faut se faire aucune illusion sur la question de la douleur. Planifiez un accompagnement constant par un proche à l’hôpital, au moins le jour vous aurez de l’aide, et pas seulement moralement, étant donné l’organisation aberrante du travail au sein des équipes de soin. Je ne sais pas ce que j’aurais fait sans mon conjoint pendant les 9 jours d’hospitalisation. La nuit, ben… on compte les minutes jusqu’au matin. Voilà, c'est dit.
Je suis à 5 mois post-op maintenant, le temps passe vite. Je vais de mieux en mieux, surtout depuis Noël. Je marche chaque jour et de plus en plus loin, j'ai recommencé à prendre en charge certaines tâches ménagères, la station debout est moins pénible. Je vais chaque semaine chez ma kiné ostéopathe et faire de l'aquagym dans une piscine chauffée. Mais la douleur reste très présente. J'ai beaucoup plus mal aujourd'hui qu'avant l'op, même si cette douleur est moins forte qu'il y a quelques semaines. Je prends toujours la dose maximale d'acétaminophène chaque jour et à l'occasion, 5mg d'un dérivé de la morphine. Mais j'ai mal tout le temps, l'acétaminophène ne fait que diminuer la douleur, elle ne l'élimine pas. J'ai mal surtout dans la région haute du dos, une sensation de forte brûlure perpétuelle. J'ai encore besoin de m'allonger quelques heures chaque jour. Je sais qu'il faut être patient, et ce n'est pas tellement d'être patiente que je trouve difficile, mais plutôt d'être confiante: même si mes progrès sont réels, les mauvais jours, je ne peux m'empêcher ce craindre que mon dos droit n'ait fait de moi une handicapée à vie. C'est là-dessus que je travaille chaque jour: sur la sérénité à conserver malgré tout, sur la confiance en cette formidable capacité du corps à se réparer.
Je ne sais pas si je vous ai remerciées, toutes, pour vos bons mots, votre soutien sans faille, sans SP, je me serais sentie si isolée! Je vous suis extrêmement reconnaissante de votre solidarité!
